
Note de règlement intérieur concernant la participation à des fils de discussions que j'ouvre.
Chacun établit ses propres règles (ou pas). En ce qui me concerne, quand j'ouvre une discussion en publiant un message, je tiens à ce qu'elle obéisse à ce qu'on pourrait appeler une "éthique de la discussion" (ou des "conditions minimales de discussion" voir note en bas de page). Rassurez-vous, rien de très compliqué, ni de très original.
1. Les débats doivent être argumentés. Si vous n'avez pas assez de caractères disponibles pour fournir une argumentation développée, changez d'instance ou proposez une suite de messages numérotés pour qu'on s'y retrouve.
2. Quand c'est possible et pertinent, une affirmation ou une critique doit être sourcée. J'en ai un peu ma claque des affirmations à l'emporte pièce qui ne font que s'aligner sur un discours mainstream (quel qu'il soit), sous le régime du "ça va de soi", ou "cela est tenu pour acquis". Une vidéo ou un article de 3 lignes dans un média à la mode n'est pas une source très convaincante : à tout le moins, ça mérite commentaire.
3. Prendre soin de la pluralité des opinions, et de la complexité du monde. Accepter de sortir de son quant-à-soi, de son identité idéologique crispée. Se garder comme du lait sur le feu de toute essentialisation. Admettre qu'on ignore bien des choses, beaucoup plus qu'on en connaît. Ne pas prendre pour argent comptant ce que disent les "autorités" en la matière, aussi admirables soit-elles. Songez à varier les perspectives : les débats franco-français sont rarement pertinents sur les fils de discussion que je propose, il existe des milliers d'autres manières de penser et d'habiter le monde - et c'est ce qui le rend si complexe.
Etc.
4. Je refuse catégoriquement toute intervention qui manifeste de la violence, du mépris, de la condescendance, de l'humiliation. Il y a bien assez de violence comme ça. Si on considère qu'un désaccord est trop profond, on peut le signifier en quelques mots, bloquer la personne, s'abstraire de la discussion. Ça arrive. C'est inévitable. Mais ça ne justifie pas de rajouter une couche de violence pour "avoir le dernier mot". Bloquer quelqu'un est déjà suffisamment violent comme ça (et peut répondre à une violence subie), mais a le mérite de clore le cycle de la violence au moins à cet endroit.
5. Règle absolument impérative (je bloque direct en cas de défaut) : jamais d'attaque ad persona sur mes fils de discussion. Jamais de procès de la personne qui parle "en tant que personne". Si cette personne vous insupporte, bloquez-la. Si mon règlement vous insupporte, bloquez-moi. Dites vous toujours que la personne avec laquelle vous discutez a sa propre biographie intellectuelle, politique, affective, qui diffère probablement en partie de la vôtre, et qu'elle a des raisons pour penser ce qu'elle pense. Tout savoir est situé. Il n'existe pas de point de vue valide universellement.
6. Lâchez-moi la grappe avec vos histoires de partis politiques et leur prêt-à-penser en vue des élections et blablabla - j'en ai rien à carrer, mais vraiment. J'ai 57 ans, j'en ai vu défiler des injonctions à voter comme il faut. Si vous voulez vous exciter le bourrichon à ce sujet, peu m'en chaut, mais pas sur mes fils de discussion : spoiler : ce n'est jamais le sujet !
et 7. Il n'est pas interdit d'admettre qu'on a tort, qu'on a parlé trop vite, que l'autre a raison, que sa perspective fait sens même si elle n'est pas celle qu'on privilégie, que ce qui paraît pertinent à un instant T peut ne plus l'être autant à l'instant suivant,, et que deux personnes en désaccord puissent avoir raison en même temps !!
NB : ces recommandations s'appliquent évidemment au fil de discussion susceptible de s'ouvrir sous ce message. Ce qui m'intéresserait plutôt, c'est de connaître vos propres "règlements intérieurs" , implicites ou explicites.
Pour ceux que ça intéresse, Wilfred Rupert Bion, le grand psychanalyste anglais, parlait de "conditions minimales d'exercice" concernant la pratique de l'analyse. Je m'en inspire ici. Notez bien que ces conditions peuvent être amenées à évoluer dans le temps évidemment. On n'est plus le même à 20 ans qu'à 60, et le cours de l'histoire, les choses qu'on ignorait et qu'on apprend, peut contraindre à les modifier. Enfin, aujourd'hui, et pour le moment, voici mes règles.